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De Callelongue à la calanque de Marseilleveyre, les fortifications de Napoléon 1er au mur de la Méditerranée.
Une promenade d'environ 2 à 3 heures et de 7 km sur des sentiers bien connus qui sera l’occasion d’en savoir plus sur l’histoire militaire du port de Marseille. La balade démarre de Callelongue, direction le tracé jaune pour atteindre le sémaphore du cap Croisette, cette grande bâtisse qui domine le petit port de Callelongue à 109 mètres de hauteur. Arrivée à un petit col, on abandonne le tracé jaune pour tourner à droite en direction du sémaphore. Au bout de quelques mètres, une première ruine est visible sur la crête. C’est un ancien poste d’observation de la douane, qui est là pour nous rappeler que ce coin isolé de Marseille fut un haut lieu de la contrebande. De ce poste, on aperçoit en face, sur la crête de la Mounine, un autre poste de surveillance que nous présenterons un peu plus loin.
Poste de douane du Sémaphore En continuant la grimpette dans le sentier et après avoir franchi des éboulis de tuiles et de briques, on arrive sur la terrasse du fameux sémaphore ou plutôt « poste électrophorique » du Cap Croisette. Sa construction fut décidée en 1862 du temps de Napoléon III, afin de surveiller l’approche Est de la rade de Marseille. Mis en service en 1863, il communiquait par des mats à signaux avec les sémaphores du Bec de l’Aigle et du Frioul. C’est un modèle classique « Méditerranée » de type 1860 que l’on retrouve sur toute la côte méditerranéenne. La partie rectangulaire hébergeait les logements du chef de poste et de son adjoint. La tour ronde adjacente comprend trois niveaux et la terrasse de veille. Entre les deux guerres, le mât de signaux type « Depillon » qui était sur la tour, fut remplacé par un projecteur lumineux pour améliorer la communication de nuit.
Sa difficulté d’accès par un unique chemin muletier, fut à l’origine de son désarmement après la fin de la 2ième guerre mondiale. Définitivement, abandonnée par l’armée en 2005, il a été vandalisé, mais est en cours de restauration par le parc national des calanques qui en assure dorénavant la gestion. Des informations complémentaires sur les sémaphores sont disponibles sur : www.initiative-pim.org/sites/default/files/fichier/documents/0000635W.pdf Quelques mètres en dessous, se trouve la batterie du sémaphore de Croisette et ses deux cuves pour canons de 95mm Lahitolle. Elle a été construite entre les deux guerres, afin de mieux contrôler le passage entre les îles (Riou, Maïre) et la côte. Elle se composait de 2 canons canon de 95mm Modèle 1888 sur affût C Modèle 1904 G, ou canon de 95 G et d’un poste d’observation entre les deux cuves BE Modèle 1892-27 (JJ Moulins, forum Sudwall). Ces canons d’un portée de 10000 mètres avaient l’avantage de pouvoir être utilisés par des servants peu entrainés comme le chef de poste du sémaphore et son adjoint. http://www.passioncompassion1418.com/Canons/AfficheCanonGET_TEST.php?IdCanonAffiche=599" target=? Son statut varia de batterie de combat et de semonce en 1936, en batterie de semonce en 1940. Elle fut désarmée dans l’immédiat après-guerre. Cuve 1 pour canon de 95mm
Poste d'observation de la batterie du sémaphore de Croisette
Il est maintenant temps de redescendre du sémaphore, en revenant sur nos pas en direction du petit col et du sentier jaune. Un sentier noir pointillé part immédiatement après le col, il va nous amener en bord de mer, sur le sentier noir, direction la calanque de Marseilleveyre. La petite calanque de la Mounine est vite dépassée, le sentier tourne à gauche et après une centaine de mètres, nous arrivons au niveau du deuxième poste de surveillance de la douane. Pas de sentier, pour y grimper, il faut passer à travers la végétation et monter tout droit. Une fois arrivée, la vue sur la côte récompense des efforts. Abri douanier de la Mounine Vue depuis l'abri douanier de la Mounine
Il faut à nouveau redescendre prudemment pour rejoindre le sentier noir et continuer vers la calanque de Marseilleveyre. Le sentier s’élargit et rapidement se profile une construction massive en pierre, surnommée à tort « l’amphithéâtre ». Rien à voir avec une origine antique, il s’agit de la batterie de la Mounine, construite en 1813 par Napoléon 1er pour accueillir 3 canons de 36 pouces sur affut de côte et un mortier de 12 pouces.
En ce temps de guerres incessantes, la marine britannique, maitresse des mers depuis Gibraltar, appliquait un blocus féroce pour affaiblir la France. Ses frégates croisaient au large du port de Marseille et il fallait protéger les navires qui cherchaient à forcer le blocus.
La batterie est relativement bien conservée, même si poudrière et corps de garde ont disparu. Il ne reste que les fondations. On peut supposer que les belles pierres de taille furent réemployées lorsque la gravière de la calanque de Marseilleveyre a été mise en production. Vue des batteries de la Mounine (près de la mer) et de Four de Caux (en haut)
Vues avant et arrière de la batterie de la Mounine
Dalle de support du mortier de 12 pouces.
Sur un éperon rocheux, au-dessus de la batterie de la Mounine, on peut apercevoir un mur incurvé. Il s’agit de la batterie du Four de Caux surement érigée à la place ou à proximité d’un four à Chaux. La date et l’origine de cette batterie sont inconnues. La position de cette batterie est à priori illogique : beaucoup trop haute et en retrait pour espérer couler un bateau. Le site http://calanco.fr/riou/batteries.htm indique que des pièces d’époque Louis XIII y furent retrouvées.
Le mystère s’éclaircit en lisant l’atlas de la fortification de 1818 qui indique que la batterie de la Mounine est vulnérable à une attaque par débarquement et qu’il faut plus de 3 heures à des troupes pour arriver en renfort depuis Marseille. En conséquence, elle est protégée par une batterie excentrée pouvant canonner les agresseurs. C’est donc le rôle de la batterie du Four de Caux et cela explique sa position.
La montée à la batterie du Four de Caux se fait à travers la végétation et en cheminant sur quelques traces de sentiers à moitié disparus. Il vaut mieux l’aborder par sa gauche dos à la mer, puis traverser longitudinalement un petit pierrier un fois à sa hauteur. En arrière de la plateforme de tir, se trouve la ruine d’une baraque en pierre. Il s’agit surement de la réserve de poudre et de boulets. Les quelques tuiles encore visibles dateraient également de l’époque Louis XIII selon la source citée supra.
La batterie de four de Caux. reste de la poudrière de la batterie de Four de Caux reste de tuile d'époque Il est temps de redescendre prudemment pour rejoindre le sentier noir.
De retour en bord de mer, juste après la batterie de la Mounine, apparaissent des vestiges du mur de la Méditerranée : un beau poste de tir allemand surnommé « tobrouk » car utilisé pour la première fois dans cette ville. C’est un bunker individuel qui pouvait être armé d’une mitrailleuse, d’un mortier, d’un petit canon voire d’une tourelle de char ou tout simplement d’un fusil comme cela semble être le cas ici. Le reste d’une tranchée se devine avec quelques barbelés d’époque. Les allemands qui aimaient les choses ordonnées avaient attribué le numéro 185 aux positions de défense de la calanque de Marseilleveyre. . Un sous-officier et 14 hommes de troupe composaient la garnison allemande d’occupation. Peu avant la libération, Ils disposaient pour défendre la position de 3 mitrailleuses légères dont une installée en Tobrouk et 1 canon antichar de 75mm.
Tobrouk allemand à coté de la batterie de la Mounine reste de tranchée allemande
Si on continue la balade et que l’on traverse la plage pour remonter de l’autre côté de la calanque, on arrive à un deuxième Tobrouk allemand, phagocyté par un cabanonier qui a remplacé les canonniers. Le trou de combat est bouché par de la calandrite mais on devine la tranchée d’accès qui permettait d’y accéder.
Tobrouk allemand n°2 à l'est de la calanque de Marseilleveyre
Au niveau du Tobrouk, on peut apercevoir les fondations d’un muret dépassant à peine du sol. C’est ce qu’il reste de la batterie initiale qui protégeait la crique. Cette position ancienne pour un seul canon était déjà abandonnée sous Napoléon 1er
Fondations de la vieille batterie pour 1 canon.
A 50 mètres de là, la batterie de Riou (ainsi appelé dans l’atlas de 1818) nous tend les bras. Avec sa consœur de la Mounine, elle protégeait le mouillage de Riou qui pouvait abriter 10 à 12 vaisseaux de ligne. Les canons étaient disposés en ligne droite protégés par un talus de terre et un mur en pierre. Elle fut agrandie en 1812 à partir d’une position droite pour 2 canons sur affut de côte et un corps de garde pour 8 soldats. Un corps de garde pour 30 soldats fut construit ainsi qu’un nouveau magasin à poudre. Batterie de Riou en 1813 et de nos jours vue générale de la batterie de Riou
Il ne reste pas grand-chose de la batterie si ce n’est le logement du gardien, la cuisine et le corps de garde qui ont été transformés en cabanons. Le grand mur de pierre qui ceinturait la plateforme de tir a disparu à l’exception d’un petit morceau. Là aussi, il y a des chances que les pierres taillées ont été réemployées pour construire les bâtiments de la gravière.
batterie de Riou, reste du talus, et maison du gardien et cuisine Batterie de Riou, reste du mur de protection. Il est maintenant temps de rentrer à Callelongue en revenant sur nos pas par le sentier noir. Merci à Marina Sanchez pour les plans d'époque, J.J. Moulins, forum sudwall.superforum.fr, site les calanques du Dr Albert |